« Le Devoir Conjugal » en France : Entre Mythe et Stress Relationnel »
« Le Devoir Conjugal » en France : Entre Mythe et Stress Relationnel »
Introduction :
Au-delà de la question juridique du "devoir conjugal", il est essentiel de souligner que les relations sexuelles peuvent générer du stress lorsque le respect des besoins individuels n'est pas au centre des échanges. Le consentement clair et mutuel est la clé d'une relation saine, et l'incapacité à exprimer librement ses limites peut engendrer un stress considérable. Cette réalité concerne indistinctement les hommes et les femmes, soulignant l'importance d'une communication ouverte et respectueuse dans toutes les relations intimes. Ainsi, aborder la question du "devoir conjugal" va au-delà du contexte juridique pour s'ancrer dans la nécessité de promouvoir des relations émotionnellement sûres et équilibrées.
Consentement et devoir conjugal
Au sein des relations sexuelles contemporaines, la question fondamentale du consentement prend une place prépondérante. Que ce soit au sein d'un couple marié ou en dehors, l'idée que les relations intimes devraient toujours être consensuelles est aujourd'hui incontestable. Cependant, une ombre persiste sur la notion du "devoir conjugal". Existe-t-il réellement en France, ou est-ce une interprétation erronée de la loi sur le mariage ? Pour éclairer cette problématique, examinons ce que nous dit la loi, tout en nous appuyant sur les analyses du Collectif Féministe contre le Viol (C.F.C.V.), un groupe d'experts se penchant sur les abus dans le cadre du mariage.
« Concernant le « devoir conjugal », cette notion n'a aucune base légale que ce soit dans notre code civil ou notre code pénal. Néanmoins, une mauvaise et dangereuse interprétation de la loi et notamment de l'article 215 du Code Civil " les époux s'obligent mutuellement à une communauté de vie" (en vigueur depuis le 1er juillet 1976) a créé une jurisprudence sanctionnant civilement des épouses/époux au motif qu'elles/ils refusaient d'avoir des relations sexuelles dans le cadre du mariage.
Que disent les tribunaux ?
Des Cours ont interprété la "communauté de vie" comme l'obligation d'une sexualité entre époux.
Les décisions de ces cours sont d'autant plus incompréhensibles que le viol entre époux est lui, reconnu par la jurisprudence depuis 1990 (Cour de cassation, chambre criminelle, 5 septembre 1990, Pourvoi n° 90-83.786) et confirmé par une autre décision de justice en 1992 (Cour de Cassation, Chambre criminelle, 11 juin 1992, Pouvoi n° 91-86.346).
C'est la loi du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein d'un couple ou commises contre les mineurs qui vient entériner dans notre code pénal le viol conjugal en son article 222-22. En effet, cet article disposait " le viol et les autres agressions sexuelles sont constitués lorsqu'ils ont été imposés à la victime dans les circonstances prévues par la présente section, quelle que soit la nature des relations existant entre l'agresseur et sa victime, y compris s'ils sont unis par les liens du mariage. Dans ce cas, la présomption de consentement des époux à l'acte sexuel ne vaut que jusqu'à preuve du contraire ».
Par ailleurs, cette loi du 4 avril 2006 fait du viol conjugal un crime aggravé.
La loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants a depuis modifié l'article 222-22 du code pénal précédemment cité. En effet, l'article dispose depuis " le viol et les autres agressions sexuelles sont constitués lorsqu'ils ont été imposés à la victime dans les circonstances prévues par la présente section, quelle que soit la nature des relations existant entre l'agresseur et sa victime, y compris s'ils sont unis par les liens du mariage" et ne fait plus référence à "la présomption de consentement des époux ».
Les articles concernés par le code civil sont le 215 mais également le 212 : "Les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance. »
Ainsi, le CFCV revendique depuis de nombreuses années l'abrogation de ces deux articles 212 et 215 du Code civil évoquant le devoir de fidélité et de communauté de vie comme éléments contractuels du mariage permettant encore aujourd’hui de poursuivre une femme pour non-respect du devoir conjugal (280 jugements civils depuis 1980). »
Pour conclure,
La réflexion sur le "devoir conjugal" met en lumière une tension palpable entre les termes légaux qui encadrent le mariage. Alors que l'article 215 du Code Civil énonce que "les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance", le concept de "devoir conjugal" est en contradiction avec le principe fondamental du respect. Forcer son partenaire à une relation sexuelle va à l'encontre de l'équilibre requis pour construire des relations intimes épanouissantes.
Ainsi, apprendre à dire non sans violence et oser affirmer ses besoins sans générer de stress ni d'emprise sur l'autre sont des aspects cruciaux dans la construction de relations sexuelles empreintes d'amour et de respect total. En encourageant un dialogue ouvert et respectueux, il est possible de favoriser des échanges intimes qui reflètent la véritable essence d'une union consensuelle et épanouissante. En fin de compte, la loi du respect mutuel doit prévaloir au sein de toute relation, transcendant les anciennes notions ambiguës du "devoir conjugal".
Source :
COLLECTIF FEMINISTE CONTRE LE VIOL
Tel administratif : 01.45.82.73.00
E.mail : [email protected]
Organisme de formation n° 11752274575
N° national "Viols-Femmes-Informations" : 0.800.05.95.95
site : www.cfcv.asso.fr
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